Le 2 août, fête nationale pour la courte histoire de la Macédoine

2 Août Skopje

Dépôt des gerbes pour la fête nationale à Skopje         Photo Virginie Favrel

Le 2 août représente une date hautement symbolique pour la Macédoine.  Deux événements majeurs sont célébrés ce jour : l’insurrection d’Ilinden de 1903, et la reconnaissance du pays en tant qu’entité fédérale de la Yougoslavie en 1944.

Le premier ministre Nikola Gruevski célèbre l’événement en déposant des gerbes devant la statue de « l’Assemblée anti-fasciste pour la libération du peuple macédonien », et en prononçant un discours sur la place centrale de Skopje. Environ 200 personnes sont réunies, sous un soleil de plomb, pour assister à la cérémonie. Une foule réduite, car une partie de Macédoniens a pris la route des vacances, vers des régions plus fraîches.

« Je suis fière, on est tous fiers d’être là »

Des policiers et des gardes du corps peu avenants contiennent la petite foule, venue admirer soldats en costume traditionnels et membres du gouvernement. Un bref son de trompette et la cérémonie commence, les officiels saluent tour à tour la statue, déposent des fleurs . Une spectatrice enthousiaste acclame Nikola Gruevski et nous lance : « Je suis fière, on est tous fiers d’être là pour célébrer l’histoire de notre pays.  On doit applaudir, s’appuyer sur notre premier ministre et le soutenir. » Voyant des journalistes français, un homme en chemise à carreaux s’approche pour nous « exprimer ses idées en tant que citoyen macédonien ». Il se nomme Mitev Tom et argumente longuement : « Les grands états, la France et l’Allemagne s’intéressent à la République de Macédoine, mais souvent adoptent des positions pro grecques, alors que la Grèce refuse de la reconnaître. Ils doivent soutenir la Macédoine dans ce conflit. Les grecs ne respectent pas les droits de l’homme. Je suis révolté par le comportement de l’Union Européenne, ils doivent soutenir pas seulement la Grèce. La France non plus. En plus quand un acte de terrorisme se passe dans ces pays, par exemple pour le cas de Charlie Hebdo, tous les médias s’y sont intéressés, mais personne n’a parlé de ce qui s’est passé dans la région de Kumanovo, à une quarantaine de kilomètres au nord de Skopje, entre la police et les terroristes d’origine albanaise ! »

Un esprit nationaliste qui correspond à l’esprit de ce jour de la République. Les Albanais présents pensent pour leur part que dans l’affaire de Kumanovo, « il ne s’agit pas de terroristes mais d’un simple groupe d’insurgés ». Un sujet sensible dans le pays, la Macédoine ayant obtenu son indépendance relativement récemment, en 1991. À  travers cette commémoration, les Macédoniens entretiennent leur récente mémoire nationale, renforce leur sentiment d’appartenir à un état légitime, qui souhaite plus de reconnaissance à l’échelle européenne.

Discours Nikola Gruevski

Discours de Nikola Gruevski – photo Jacopo Landi

Quelques minutes plus tard, les yeux rivés vers le premier ministre, une  centaine de citoyens macédoniens attend avec impatience le discours officiel.  Malgré la chaleur étouffante, personne ne semble vouloir déroger à la tradition. Après avoir entonné les paroles de l’hymne national, « Denes nad Makedonija » * (ce qui signifie en français « Aujourd’hui sur la Macédoine »), plus aucun bruit ne se fait entendre dans la foule, massée autour d’un petit chapiteau dressé spécialement pour l’occasion, sur la place centrale de Skopje. Tout autour, se dressent de monumentales statues célébrant l’identité macédonienne : une fontaine d’Alexandre le Grad se dresse sur plus de vingt mètres, et des sculptures des grands hommes nationaux entourent la place, encore en travaux.

Un discours fort et retentissant

« Il est important de ne pas oublier notre passé et d’en faire écho dans notre quotidien. » Nikola Gruevski plante le décor. Avec ce besoin de fédérer un peuple autour d’idées et de valeurs fondatrices. « Pour avoir des bases solides », explique alors une citoyenne macédonienne présente pour l’occasion.

Et après le traditionnel hommage à la Nation, le premier ministre rappelle, dans un discours bien ficelé, les différents sujets à traiter prochainement par le gouvernement. Au cœur des débats : la crise grecque, la question du transit des migrants qui affluent par milliers quotidiennement à travers le pays, et le débat autour de la diaspora macédonienne. Nikola Gruevski ajoute notamment que « la crise en Grèce a profondément meurtri le pays, qu’elle a considérablement influencé la Macédoine et qu’elle la tire vers le bas ». En effet, « près de 30 % de l’économie macédonienne dépend de ce pays frontalier. Un ralentissement économique et politique ». En ce qui concerne la question des migrants, celui-ci précise « qu’il y aura de nombreux travaux à effectuer. » A l’avenir, le gouvernement espère d’ailleurs « trouver des solutions efficaces, et transformer  les migrants qui traversent le pays, en résultat positif pour la Macédoine ». Un discours en phase avec les résultats économiques récents du pays, qui a connu un taux de croissance de 3,8% en 2014.

Manon Mercier – Anna Lefour – Vasiliqi Kume


Le 2 août 1903 eu lieu l’insurrection d’Ilinden : le soulèvement du peuple macédonien contre l’empire ottoman. A sa tête, le soldat Pitu Guli membre de l’ORIM (Organisation Révolutionnaire Intérieure Macédonienne) remporta une victoire éphémère contre l’occupant, donnant naissance à la république de Krouchevo qui perdura dix jours. L’armée de l’empire ottoman détruisit la république naissante, et mènera une répression féroce contre la population, brûlant plus de 150 villages macédoniens.

Fanette Catala